"Madame, Madame, pas de photos ici!"
Le commerce et la photographie. Relation emmêlée. J'ai envie de lui parler, de lui demander pourquoi exactement pas de photos ici. Pourquoi j'ai envie d'en faire ; quelles questions je rencontre. Envie d'en parler avec lui. Mais il bosse. Plutôt : le mais, ici, prend la formule de "il bosse".
Un homme m'approche, arrivant à ma hauteur le long du marché : "tu fais de belles photos? Prends un café? Tu veux prendre un café avec moi? Non? Tu es journaliste?" Je suis intimidée, légèrement gênée, je fais tangente, tout en le regrettant au moment même : c'est exactement l'entrée que j'aimerais.
Hier, une dame en foulard d'hiver sur tout le buste, bien directement : "Vous avez un euro?"
Une femme avec une béquille, les cheveux blonds serrés, un pansement sur un oeil, le corps tourné dans cette direction et dans l'autre, à un passage piéton. Je passe en regardant droit, dans le vide. Je n'ose pas. Je me dis que je vais faire de la monnaie en achetant du pain, et que je repasserai lui donner ; que je pourrais lui parler de la gêne, et lui demander d'en parler avec moi. Comme par hasard, je dépense la monnaie faite, et l'évite au retour.
Pourquoi ce sont les gens vers qui je voudrais une entrée? Les gens d'ici.
Le rapport photographique.
La "street photography".
Ces questions, leur orbite lente.